Beau parcours que celui de Julien Duboué. En moins de dix ans sur le pavé parisien, il est parvenu à créer avec l’audace d’un cadet de Gascogne trois belles affaires parisiennes, l »Afaria », dans le fond du 15e, « Dans les Landes » dans le 5e, (aujourd’hui vendues) et A Noste dans le 2ème, toujours entre ses mains qui ne désemplit pas.
C’est d’autant plus brillant que ce fils d’ouvrier métallo et de femme de ménage est arrivé à Paris sans un kopeck dix ans plus tôt. Aux âmes bien nées… Cette réussite prouve à elle que, non seulement l’art du bistrot parisien paye, mais qu’un passage chez de bons chefs de la grande gastronomie n’a rien d’antinomique avec la création de bons bistrots. Au contraire.
Après l’école hôtelière à Biarritz, le Landais n’est pas resté longtemps au pays Basque, il est vite monté dans la capitale travailler au Carré des Feuillants d’Alain Dutournier puis au Drouant d’Antoine Westermann.
La grande cuisine ne l’a pas détournée de son terroir. Il transcende les recettes de ses landes natales avec une trentaine de tapas aussi personnalisés qu’explosifs dans les palais. Genre falafel de foie gras et magret fumé, araignée de cochon à la plancha, sans oublier le tartare d’huitre et de magret…
Pour une fois, ce n’est pas une formule creuse. Voilà un garçon qui fait vraiment vivre son pays. C’est son père, à la main maraîchère exigeante qui, du pays, organise le groupage des produits -des asperges des Landes au bœuf de Chalosse sans oublier les pibales et autres confits- et leur acheminement sur Paris. Ce recours à une quinzaine de producteurs indépendants est une belle alternative à l’uniformité du Sud-Ouest mitonnée à la façon des géants maïsiers qui rachètent à tour de bras les producteurs de foie gras et dont le seul but est de trouver toujours plus de débouchés à leur maïs.
Un maïs dont l’irrigation longtemps financée par l’Union européenne ne compte pas pour peu dans l’assèchement de la nappe phréatique du grand Sud-Ouest et des atteintes à la bio-diversité à commencer par la disparition des abeilles. Reste à savoir si le jeune Duboué parviendra à défendre cette indépendance et à ne pas servir – à l’instar de nombre de certains chefs narcissiques – de porte-drapeau d’un productivisme antinomique de la sauvegarde de vrais terroirs. Croisons les doigts comme deux pibales…